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"La Nouvelle Figuration en France, le Pop Art ou l'Hyperréalisme aux États Unis se tournent vers une forme de réalisme, très distanciée.
Cette peinture figurative semble, dans le traitement de ses sujets, rejeter toute implication personnelle, toute facture qui permettrait d'identifier son créateur." ... c'est ce que je vous expliquais dans un article précédent ; revoir ici.
Dans ce genre de travail, on ne voit plus la " patte" du créateur, on ne voit plus sa touche "physiquement" ...
Pas de traces de brosse, de geste, pas de matières ou d'empâtements,
L'image nous interroge : est ce une photo, une peinture ... une reproduction ? Nous fait poser question : " comment c'est fait ?" ;
Bien sur le message ou l'émotion est induite ; le choix du sujet, le cadrage, le choix de la technique est conduite par l'artiste, mais sa réalisation semble "impersonnelle"...
Nous continuons et continuerons à nous interroger sur l'intention de ces peintres ( en débattre pendant les cours et ateliers est une bonne chose pour que chacun, chacune exprime ses ressentis, ses doutes, ses questionnements).
Mais avant tout , la peinture est ici geste technique : comment traduire cette distanciation sur la toile ou le papier, techniquement comment faire ?...
Je vous ai évoqué l'une des techniques, la "première" que l'on peut utiliser dans une volonté de distanciation :
- La technique " léchée": relire ici
Mais il existe d'autres façons de mettre une distance entre la main qui crée et le support, entre l'acte créateur et le résultat pictural ou plastique.
Je vous en fais une petite liste pour vous y retrouver en l'illustrant par quelques exemples.
- Les techniques mécanisées :
- la photographie : en modèle, en collage, en transfert sur la toile.
- la sérigraphie ( en savoir + : ici)
- l'aérographe : cet appareil « mécanisé » permet une distance effective entre la main créatrice et le support car l'outil évite le contact direct avec la surface à peindre, contrairement au pinceau qui pourrait trahir le geste.( découvrir ? là ) ... merci Wikipédia 😉
Andy Warhol (1928- 1987) ne cache pas sa volonté d'anonymat de l’œuvre ; la réalisation de multiples, de séries qui le caractérise vont dans ce sens : dans son atelier, bien nommé « Factory » ( "Usine" en français) sont réalisées à la chaîne des reproductions des "Marilyn", des "Elvis Presley", ou celles des " boites de soupe"...Robert Rauschenberg ( 1925 – 2008) utilise le report photographique et insére des morceaux de civilisation « made in USA » dans ses "combine-painting",Rétroactive II, 1964, huile, sérigraphie sur toile, 213x152cm.
Collection Stefan T.Edlis. - Richard Hamilton ( 1922 – 2011) comme de nombreux artistes américains issus de la formation publicitaire, manie l'aérographe ainsi que Peter Klasen (1935), en France.
Richard Hamilton : " “Just what is it that makes today’s homes so different, so appealing ?” 1956 Paul Klasen fait toujours l'actualité :
le suivre ici
Ces procédés mécaniques utilisés par ces artistes, affichent la volonté de s'effacer derrière l’œuvre, mais malgré tout n'occupent pas toujours la totalité de la surface de la toile ; les couleurs vives jouent les débordements, des tracés multiples se retrouvent sur les effigies de Mao chez Warhol, les coulures sur les peintures de Rauschenberg, les effets de non fini chez Hamilton, ... trahissent la personnalité et la "présence"de l'artiste.
La distanciation absolue pourrait se révéler chez les artistes français du « Mec Art » (Alain Jacquet – 1933 – 2008 – S. Buri -1935) dès 1965 qui utilisent alors systématiquement des procédés de reproductions mécaniques, expérimentant toutes sortes de trames.
Le déjeuner sur l'herbe revu par Alain Jacquet en 1964.Samuel Buri : la " vache paysage" :
- la photographie : en modèle, en collage, en transfert sur la toile.
- Les techniques d'emprunt :
"L'image" à partir de cette époque, entre dans la vie quotidienne de toutes les façons : la peinture certes, mais aussi les photos ... dans les journaux et les magazines, le cinéma , la télévision, l'illustration, la publicité, la bande dessinée, gagnant au fur à mesure des décennies les écrans d'ordinateur, les tablettes et autres smartphones : autant de moyens, autant de codes visuels qui interpelleront et intéresseront les artistes.
Ils vont pouvoir utiliser les moyens photographiques ou graphiques utilisés dans ces différents domaines, mais aussi leurs codes photographiques ou graphiques.- La bande dessinée :
Adami (1935) travaille avec les cernes et les aplats,Erro (1932) usurpe les personnages clé au monde enfantin pour les mettre en scène dans des dénonciations à la fois politiques et sociales.
"Mickey et ses enfants" 2007-2008
Lichtenstein ( 1923- 1997) n'hésite pas non plus à grossir phylactères et onomatopées qui deviennent à part entière des représentations artistiques, confrontés aux aplats environnants, pour montrer que le Pop Art reste bien une référence « populaire ».
"That's the way I don't care" - L'illustration : se voit détournée dans un traitement impersonnel qui se réfère souvent aux reportages journalistiques.
G. Fromanger (1939) représente des scènes banales de la vie parisienne à la manière d'un cliché anodin comme une esquisse prise sur le vif pourrait le restituerArroyo (1937), dans ses dénonciations sur le régime franquiste pratique un mixage de techniques réalistes très déroutantes pour donner à voir l'objet de ses récriminations avec une objectivité totale : « Heureux qui comme Ulysse » 1976
- L'affiche :
La publicité enfin se met au service de nombreux peintres du Pop Art qui s'approprient le format des affiches monumentales ( T. Wesselmann (1931- 2004 ) , R. Indiana (1928) , S. Rosenquist (1933), Rancillac (1931)) et les couleurs acryliques rutilantes pour mieux se confondre avec l'anonymat de ces représentations.
T. Wesselmann," Stil lLife No.35", 1963
- Travail de groupe :
Enfin, le brassage des œuvres par des groupes d'artistes peut constituer l'ultime façon de garder " l’anonymat" : comment distinguer la part de création de chacun des membres.
Ainsi le groupe des Malassis dans le « Grand Méchoui ou 12 ans d'histoire de France » (1972) : 64 toiles qui seront décrochées " entre deux charges de CRS" en 1972, lors de l’exposition "1960-1972, douze ans d’art contemporain en France" qui s’ouvre au Grand Palais à la demande de Georges Pompidou,
Le groupe espagnol «Equipo Cronica » mélange les styles et les références remettant en question les valeurs traditionnelles et « la fausse innocence des images ».
"La factoría y yo", 1970Et tout est dit, nous sommes bien dans une nouvelle époque dans :
"Vivre et laisser mourir ou la fin tragique de Marcel Duchamp" 1965, par Aillaud, Récalcati (1938), Arroyo,Merci et En savoir + :
- les fiches Wikipédia sur les différents artistes et courants artistiques,
- les sites de ces artistes encore " en activité ,
- " Arts plastiques du XX° siècle - questions essentielles d'Alain Biancheri Collection Giordan et Martinand.
- La bande dessinée :
Très interessant, MERCI Christine de nous faire connaître de nombreux artistes contemporains dont certains,(beaucoup en vérité !!) m’étaient totalement inconnus.
Merci de ce petit com ; j’espère que tu vas bien et que tu peins toujours; il faudra que tu me montres ce que tu fais ! Bises
Merci beaucoup. C’est en comprenant qu’on apprécie.
Je le pense aussi et de plus notre ” écriture artistique ” s’enrichit …
tout se range dans ma petite tete!!!!!!!!!et je vais essayer de tenter une implication personnelle !!!
pour me rappeler tout cela!!!!!
merci pour l explication de cette periode riche en couleurs en idee
gros bisous
mireille
Tu as bien rangé tous les tiroirs ? >… dans ta tête 😉 Il me tarde de voir ce que tu as imaginé …
Merci Christine pour cet article précis, passionant et qui donne envie d’aller voir plus loin et aussi pour l’apprentissage du “transfert” , une technique nouvelle pour moi qui ajoute au savoir faire traditionnel et ouvre des horizons de création.
amicalement
Jean
Merci … et voilà la suite et fin …