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"L'art calligraphique s'accomplit au moyen du pinceau.
Celui-ci est manipulé par les doigts, lesquels le sont par le poignet et l'avant-bras.
L'avant-bras, lui, obéit au coude et le coude se laisse guider par le bras et l'épaule.
Épaule, coude, avant-bras, doigts appartiennent tous au côté droit du corps, lequel s'appuie à son tour sur le côté gauche du corps.
Les deux côtés, ensemble, forment la partie supérieure du corps.
Celle-ci, bien entendu, ne saurait fonctionner que grâce à la partie inférieure du corps, et plus particulièrement aux deux pieds.
Fermement posés sur le sol, les deux pieds incarnent par excellence le plein de la partie inférieure du corps.
C'est à partir de là que tout se joue.
Le plein de cette partie inférieure a pour mérite en effet de permettre à la partie supérieure du corps d'être habitée par le vide.
Non un vide pur et inerte, car, tout en étant habitée par le vide, la partie supérieure possède aussi son plein qui n'est autre que son côté gauche.
Prenant appui sur la table et se reliant en même temps aux deux pieds, ce côté gauche, plein, permet alors au côté droit d'être habité par le vide.
Mais à l'intérieur du côté droit, ainsi rendu disponible, s'instaure à nouveau un jeu de vide et de plein en chaîne, chaque élément qui le compose devenant tour à tour plein et vide.
C'est ainsi que l'épaule vide, devenant pleine, agit sur le coude vide; le coude vide, devenant plein, agit sur l'avant bras vide; l'avant-bras vide, devenant plein, agit sur les doigts vides.
C'est dans les doigts que le vide atteint son extrême.
Cependant le vide qui s'y loge ne saurait tourner "à vide"; il faut qu'il devienne à son tour plein.
Car les doigts, ne l'oublions pas, sont prolongés par le pinceau.
Or, le vrai pinceau, selon l'expression heureuse des Anciens, doit être comme un "tube crevé", dans la mesure où le vide des doigts doit entièrement passer en lui au risque même de le faire éclater.
Gonflé de vide, le "tube crevé" qu'est le pinceau ne se limitera pas au rôle d'un simple réceptacle : il est en charge de tout le mouvement dynamique du corps que nous venons de décrire, mouvement dont il est l'aboutissement.
Investi d'un pouvoir plénier, il est à même d'imposer une action double : par son plein, il imprime l'encre dans le papier si fortement qu'il semble le traverser : par son vide, il glisse sur le papier, aérien tel un pur esprit qui sur son passage remplit l'espace de sa présence sans laisser de traces palpables".....
Ch'eng Yao-t'ien
Théoricien de l'art calligraphique -Dynastie Ts'ing(1644- 1911)
Texte tiré du livre de François Cheng : "Souffle-Esprit" dans la collection Points
C’est basé sur le même principe; le gestuel amenant ici au trait posé sur la papier..;Qi Gong, Tai Chi… Basé sur le même “esprit ” : “le souffle” … d’où le nom du livre de François Cheng
Si j’ai bien compris pour la calligraphie, avant de prendre son pinceau, une bonne connaissance des principes de posture, quelques exercices de relaxation devraient nous permettre de peindre avec aisance et sérénité,
Que penses-tu du Qi Gong?
Raymond Devos n’aurait pas fait mieux !!! Entre les vides qui deviennent pleins et les pleins qui remplissent les vides … entre la gauche et la droite qui, s’il n’y a pas la gauche, ne peut pas être la droite …
Bravo Christine ! Pour une fin de semaine studieuse, nous sommes comblées !
Bon dimanche à vous ! Cristina
Je savais que ça allait te plaire !!!
Bon WE … studieux …. car pluvieux !