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Si les caractéristiques de la peinture impressionniste concernent les thématiques, l'utilisation différente de la couleur, le pleinairisme, la taille des toiles ...
Relire l'article précédent : "L'impressionnisme"
Ce ne sont pas les seules directions que suivent ces artistes.
L’une de leurs préoccupations principales est de
« Peindre dans l'instant - Peindre l'instant » :
ou "La peinture comme performance" :
Leur peinture est une peinture directe : peinture « alla prima », sans dessin préparatoire ou étude chromatique qui se pratique "sur le motif ".
C'est une « peinture rapide » liée à l’intelligence du geste.
Camille Pissarro
"Gelée blanche " - 1873
Le temps représenté - le temps de représentation :
Même si toutes les peintures n’ont pas été nécessairement exécutées très vite, elles semblent avoir été peintes dans l’urgence ( des œuvres dont le temps de réalisation est de quelques heures nécessitent toutefois deux ou trois séances entre lesquelles la toile doit sécher ... peinture à l'huile oblige)
Il faut donc mettre en jeu des gestes qui évoquent au mieux cette spontanéité ...
On doit faire penser au spectateur que si le motif est en mouvement, le peintre doit lui-même se mouvoir rapidement pour en traduire avec précision la nature fugitive.
Or ce qui semble être peint dans l'instant et sembler en mouvement peut avoir été conçu lentement.
C'est la « gestuelle », la touche apparente qui transcrit le mouvement de l’artiste au travail.
Alfred Sisley -
" La Seine à Bougival en hiver " - 1872
La notion de finition :
Ce travail sera alors souvent qualifié d’« inachevé », de " non convenable" par le fait de l'utilisation du couteau ou de grosses brosses contrairement au travail traditionnel et classique où le geste est absent ; pendant des siècles la présence et le travail du peintre ne devaient pas se voir ( Cf. " Les cours en ligne" sur " La touche picturale ")
Les ébauches des peintres académiques étaient pourtant aussi réalisées avec une peinture rapide au stade préparatoire et les esquisses à l’huile existent depuis le XVII°, mais « l’impression » se réalise en touches larges, bien affirmées.
Ceci va correspondre à une large popularisation des croquis où l’artiste « en action », concentré sur son sujet doit acquérir une maîtrise telle de sa technique ( crayon, peinture et pinceaux, plume et encre… ) et de son support ( carnet, papier, toile…) qu’il peut traduire son motif sans besoin de vérifier ou corriger en cours d’action.
Le but du croquis est d’exercer la rapidité d’analyse visuelle et d’élaborer un répertoire de gestes et de marques, qui progressivement, va devenir le langage propre de l’artiste.
L'étonnante variété de « gestes » que nous pouvons observer dans les tableaux des impressionnistes correspond au caractère de chaque peintre.
Armand Guillaumin-
" Soleil couchant à Ivry"- 1869
Les peintres de Barbizon : Rousseau, Corot, Troyon, Diaz de la Pena , Daubigny ont été les précurseurs directs de la peinture gestuelle rapide mais leurs paysages étaient ensuite exécutés en atelier d’après des études et toujours construits sur l’opposition ombre-lumière, plus que sur la couleur.
Ici le tableau devient un champ visuel de sensations colorées vibrantes,
avec une nouvelle manière de voir la couleur.
L’impression « scientifique » s’oppose alors à l’impression « romantique » précédente : les volumes et les reliefs créés selon la tradition par le jeu de la lumière et des ombres sont remplacés par un unique champ lumineux composé de vibrations colorées.
Le paysage devient un état optique plutôt que physique, et peindre signifie peindre une image optique de la réalité.
Auguste Renoir -
" Le moulin de la galette" - 1876
En résumé :
L’ « impression » :
- prend naissance sous la stimulation directe d’un motif choisi par l’artiste,
- laisse voir clairement les matériaux utilisés et n’occulte pas les processus entrant dans son élaboration,
- est composé dans un langage gestuel propre à l’artiste, essentiel à l’apparence de l’œuvre,
- semble avoir été exécutée rapidement,
- est considérée comme achevée par l’artiste ( car elle est signée et librement exposée).
Et la suite ?
- "L’impression" sous sa forme la plus expérimentale conduira esthétiquement aux peintres de l’Action Painting et aux tachistes de la seconde moitié du XX° siècle ; elle précèdera et annoncera l’expérience fauve, les improvisations de Kandinsky, une grande partie de Matisse, le dessin et la peinture automatique de certains surréalistes ( Kirchner – Nolde - Marc ), les artistes dadaïstes et la peinture gestuelle sous toutes ses formes ( Fautrier - Soulages - Borduas - Riopelle - Pollock - Kline - ...)
- Cézanne ( celui d'après l'Impressionnisme), les Cubistes, l’Abstraction géométrique, Seurat, Gauguin, Picasso, Braque, Léger, Mondrian, Duchamp, Dali, Magritte … sont à contre-courant de l’impressionnisme car ils correspondent à un modernisme plus délibéré, plus lent.
En savoir + :
" Impressions : peindre dans l'instant - les impressionnistes en France 1860 - 1890" de Richard R. Brettell chez Hazan
- "L'héritage de l'Impressionnisme - Les sources du XX° siècle" de Diane Kelder - La Bibliothèque des arts.
Merci pour cette suite pleine de joie de couleurs de vibrations
Une période joyeuse où l on sent le besoin d apporter du bonheur par des visions rapides instantanées
Je te remercie pour ce moment coloré et joyeux
Gros bisous
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Belle suite sur l’impressionnisme, merci Christine pour ce nouvel article en couleurs très joyeux.
Bises
Encore un bel éclairage sur ces peintres qui ont eu le courage de leurs convictions quitte à être rejetés .J’ai quand même l’impression qu’ils formaient un groupe uni ce qui les a aidés à affronter tous les coups bas de leur concitoyens
Merci pour ce nouvel article
Bon bout d’an ainsi qu’à tous les amis de l’Ocre bleu