Les pionniers américains:la vogue de l’hyperréalisme a pu faire croire à une renaissance de la figuration, alors qu’il ne s’agissait que d’un prolongement logique de la tradition réaliste américaine.
Les Etats-unis ont connu jusqu’au Pop art, qui chronologiquement a précédé l’arrivée de l’hyperréalisme, nombre de démarches figuratives telles celles d’Edward Hooper, Charles Sheeler ou Andrew Wyeth.
Le pop art a constitué à la fois la synthèse du courant réaliste et du courant abstrait et l’apothéose de "l’american way of life". A vrai dire il constitue l’un des points culminants du réalisme américain.
Ce style 100% américain atteint son apogée au moment où le monde entier subit la fascination de l’Amérique, copie son genre de vie, se passionne pour ses "mythes", du western à la chanson, adore ses idoles...
En reportant l’attention sur l’environnement urbain, sur le pouvoir de fascination de l’image diffusée en série par les médias modernes, les pop artistes ont revalorisé la figuration qui alors semblait être le lot presque exclusif des peintres académiques.
Les hyperréalistes reconnaissent leur dette à l’égard du pop art qui a ouvert la voie au traitement des sujets banals et qui a rendu possible une peinture figurative sans référence au passé, aux vieux maîtres et aux considérations académiques.
La société de consommation bat son plein, elle "a revêtu ses habits du dimanche" : les restaurants sont propres, les rues nettoyées, les néons brillent de tous leurs tubes, les motos sont clinquantes.Tout est révélé avec une grande netteté comme s’il s’agissait de la promotion publicitaire d’un produit bien emballé ou de cartes postales éditées par un office de tourisme.
C’est cet aspect de l’hyperréalisme, mécanique mais réducteur, qui a été reconnu par le grand public et diffusé dans les médias.
Dans cet art, l’écriture personnelle est le plus souvent absente, l’atmosphère réduite au minimum et le sujet ramené au quotidien, l’artiste confirmant sa personnalité par un thème caractéristique. .
Loin de faire l’unanimité cet aspect radical est raillé par toute une frange de la critique.
Les artistes européens n’ont pas participé à l’éclosion du mouvement hyperréaliste et sont restés étrangers à la genèse et au développement du photoréalisme.
Cette forme d’art n’est parvenue en Europe qu'avec la septième Biennale des jeunes artistes à Paris en 1971, et la cinquième Documenta de Cassel en 1972. Cette manifestation eut pour thème le réalisme contemporain.
Entre 1964 et 1970 de nombreuses œuvres plus ou moins liées au Pop Art apparurent en Europe, rassemblées à l’occasion d’expositions à thèmes telles que Mythologies quotidiennes (1964), la Figuration Narrative dans l’art contemporain (1965) ou Bande dessinée et Figuration Narrative (1967).
Ainsi que le suggèrent ces intitulés, les Européens utilisaient l’imagerie contemporaine comme point de départ pour diverses formes d’une figuration dite narrative qui se différenciait nettement du courant pop des Etats-unis ou de Grande-Bretagne,.
Parfois accusés d’être cinématographiques, publicitaires, d’utiliser les codes de la bande dessinée ou de céder à l’anecdote, aucun de ces artistes ne se résout à utiliser systématiquement les techniques mécaniques de la reproduction; ils persistent tous à travailler à la main. Et même s’ils obéissent aux mêmes impératifs techniques que les hyperréalistes, cette génération d’artistes européens a produit quantité d’œuvres qui bien que d’inspiration photographique présentent des prolongements philosophiques, politiques, moraux ou sentimentaux.
Hervé Télémaque, Valerio Adami, Jacques Monory, Peter Klasen, Bernard Rancillac, Gudmundur Erro, Peter Stampfli, Gilles Aillaud, Gerhard Richter, Equipo Chronica, Figuration Critique ou le « Superhumanisme » des artistes de la Nicolas Treadwell Gallery (Eric Scott, Paul Roberts, Graham Dean …) sont représentatifs de ce courant.
Il a été souvent affirmé que les peintres européens qui utilisent des techniques hyperréalistes ne se contentent pas d’un simple constat du monde environnant mais en livrent une analyse subjective.
Ainsi ce ne serait pas tant les images ou les objets qui les intéressent que leur signification nécessairement critique, poétique voire humoristique.
Le succès international des artistes américains à partir de la fin des années 50 plongea le monde de l’art en France dans une crise face à laquelle l’américanisation constituait une réponse.
Le Pop Art français( tout comme le Nouveau Réalisme) se développa dans ce contexte.
Certaines individualités peuvent d’autre part être rattachées de façon plus étroite au mouvement photoréaliste même si celui-ci, dans sa version européenne, n’a pas la même cohérence que son homologue américain.
L’inspiration est souvent photographique, la technique sans faille mais le choix des thèmes, le travail sur les couleurs, l’ombre et la lumière apportent une dimension poétique, parfois mystérieuse aux œuvres qui différencient ces peintres des photoréalistes stricts.
Une illustration de la défiance constatée vis à vis de l’hyperréalisme américain, par les artistes européens.
Certains se rapprochent de la tradition académique. Avec une parfaite maîtrise technique, en particulier dans le domaine du dessin, ils dressent l’inventaire de la vie quotidienne. Tout dans leur travail peut être classé selon les catégories traditionnelles telles que les enseignent les écoles des Beaux-Arts : nature morte, nu, paysage.
Cependant si leur vision reste tributaire de celle des maîtres anciens, elle traduit aussi, au niveau du sujet figuré, une inquiétude moderne.Il existe en fait en Europe autant de réalismes qu’il y a de peintres, chacun contribuant à travers sa vision personnelle, dans un style qui lui est propre à une définition du réel.
S’il semble aventureux de rallier ces artistes sous une bannière commune et improbable d’un hyperréalisme européen, il faut leur reconnaître une sensibilité et une technique très proche de celles des artistes américains.
L’hyperréalisme a trouvé un écho chez certains peintres du Sud Est asiatique une dizaine d’années après son explosion aux Etats-unis. Ceci permet d’expliquer que la nature des thèmes traités par ces artistes diffère de celle abordée par les artistes américains de la première génération.
C’est moins l’aspect visuel de l’entourage quotidien et urbain qui retient leur attention que l’aspect tactile des éléments.Ainsi Tschang Yseul Kim qui reproduit des gouttes d’eau, Kim Chang–Young qui s’intéresse aux empreintes de pas dans le sable ou bien encore Ko Young-Hoon qui reproduit des pierres posées sur des pages d’écriture.D’autres artistes sont plus proches d’un hyperréalisme orthodoxe tels Hilo Chen, Chan Kin Chung ou Christopher Hamon Cheung.
Ces derniers sont venus exercer leur talent aux Etats-unis ou en Europe.
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ces deux articles sur l’hyperréalisme sont très intéressants; faire de la peinture nous ouvre aussi au monde de la création, et c’est pour moi à la fois une super détente et un agréable moment de découverte et d’enseignement; merci.