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La peinture c'est la couleur
La couleur c'est le pigment


Au cours des siècles, les artistes ont utilisé les pigments à leur disposition.
Pigments qu'ils trouvaient de façon naturelle tout d'abord dans leur environnement,
puis ... plus loin ...
( ils sont alors d'origine minérale, animale ou végétale)
jusqu'à l'utilisation de pigments synthétisés.

Je vous propose un petit parcours très résumé de l'histoire des couleurs ...
de l'histoire des pigments.


Les couleurs de la Préhistoire :


Le rouge et le noir sont les deux couleurs de base employées par l’homme préhistorique.

La couleur noire provient du bioxyde de manga­nèse ou tout simplement du charbon de bois.
La couleur rouge peut être obtenue soit à partir d’oxydes de fer naturels, soit par calcination d’oxydes de fer jaunes.
Ces pigments naturels, cou­ramment appelés « ocres », abon­dants et faciles à extraire, se rencon­trent notamment dans les régions où les hommes préhistoriques ont peint et dessiné sur les parois des grottes.
Le blanc peut être aussi ajouté : c’est le blanc de la craie … un autre minéral.

Exemple : sur les parois de la grotte de Lascaux


Les civilisations antiques :

Les Romains et les Grecs possé­daient déjà de bonnes couleurs.
Ils connaissaient en particulier le cinabre, ce merveilleux rouge provenant en grande partie de la péninsule ibérique, des régions arrosées par le Minho, d’où le nom de minium parfois utilisé.
Ils disposaient aussi des superbes ter­res rouges de Pouzzoles, et surtout du rouge en provenance de Sinope, en Asie mineure, ainsi que de bleus com­me l’azurite ou pierre d’Arménie, l’indi­go et le fameux outremer fabriqué avec le lapis-lazuli d’Orient.
Ils em­ployaient également des jaunes, ex­traits de terres limoneuses ou de plan­tes.
S’y ajoutait toute une gamme de pourpres, allant des rouges aux violets les plus intenses.

Exemple : une fresque murale d'une maison de Pompéi


Du Moyen Age à la Renaissance :

L’héritage antique s’enrichit au Moyen-âge de couleurs nouvelles ainsi le rouge vermillon, issu du sulfure de mercure, et la sandaraque, un rou­ge de plomb, de teinte orangée.
Appa­raissent également des teintures com­me la garance et certains verts, tels ceux issus de l’iris ou de baies : à Ve­nise et dans les Flandres, leur usage devait permettre d'apporter un effet de profondeur des plus réussis, dès le XIV° siècle.
Exemple : une enluminure représentant une femme écrivain : Christine de Pisan

La préparation de la couleur est une affaire d’atelier, longue et délicate, et le souci de la belle matière demeure l’une des bases du métier de peintre.
Dans l’Italie du Quattrocento (XV° siècle italien. considéré comme le point de départ de la Renaissance), le contrat passé entre le peintre et son client (prince, dignitaire ecclésiasti­que, riche bourgeois...) stipule avec précision le choix des couleurs.

L’inquiétude qu’expriment sou­vent les contrats à propos de la qualité du pigment bleu, aussi bien que de l’or, n’était pas sans fondement.
Après l’or et l’argent, le bleu d’outremer était la couleur la plus précieuse et la plus difficile d’emploi.
Il y avait des nuan­ces chères et d’autres bons marchés, et il existait même des substituts encore plus économiques qu’on appelait le bleu allemand.
Pour éviter les dé­sillusions, les clients précisaient que le bleu employé serait le bleu d’outremer et les clients encore plus prudents stipulaient une nuance particulière — outremer à un ou deux ou quatre flo­rins l’once.

Mieux, les contrats se révèlent quelquefois as­sez sophistiqués en ce qui concerne la couleur bleue ;
Un exemple : En 1408, Gherar­do Starnina s’engage par contrat à peindre dans l’église de Santo Stefano à Empoli les fresques, aujourd’hui dis­parues, de La Vie de la Vierge. Le con­trat est d’une précision méticuleuse pour ce qui concerne le bleu l’outre­mer destiné à Marie, il devra être d’une qualité égale à deux florins l’once, tan­dis que, pour le reste du tableau, un outremer à un florin l’once suffira.
La nuance plus ou moins intense exprime le degré d’importance.

La palette du peintre dispose alors d’une trentaine de tons francs ; les mélanges sont rares et apparaîtront surtout à la Renaissance.

Exemple : "Les époux Arnolfini" - Van Eyck

Mais le progrès le plus notable inter­vient au XV°-XVI° siècle, dans la ma­nière de diluer et de poser la couleur, par l’intermédiaire d’un liant à l’huile cuite du type vernis: la couleur gagne en intensité lumineuse.
Jan Van Eyck un des fondateurs de l’école flaman­de, illustre cette technique nouvelle qui permet des effets inédits de trans­parence, d’éclat ou de densité des couleurs.
On passe à des effets de clair-obs­cur grâce aux jeux de transparence des dessous et à l’emploi des laques, mais surtout grâce aux accords de tons de surfaces où paraissent des gris colorés.

Cette nouvelle conception de la lu­mière trouvera son expression la plus achevée au XVII° siècle, avec Le Cara­vage qui joue de l’opposition entre l’ombre et la lumière, puis avec Rem­brandt dont les passages plus subtils de l’une à l’autre approfondissent l’es­pace en faisant rayonner les parties sur lesquelles l’intérêt est concentré.
Le Caravage - "Fanciullo con canestro di frutta"

A l'ère industrielle :

La révolution industrielle apporte sur le marché de nombreux colorants de synthèse, ainsi que des tubes d’étain qui vont simplifier la tâche des peintres.

On invente de nouvelles cou­leurs, ce qui porte le total des tons dis­ponibles à plus de 90.
Toutes ces cou­leurs sont fraîches, attirantes, mais el­les sont dangereuses, peu résistantes à la lumière et mal mélangées dans les nouveaux tubes avec des liants de conservation.
Combien de Manet, de Renoir sur­tout, de Van Gogh ne sont aujourd’hui que l’ombre d’eux-mêmes, victimes de la nouvelle industrie des couleurs !
Que de Gauguin irrémédiablement as­sombris tandis que tant de Cézanne ont « grisé » sous l’effet des vernis.
Van Gogh - " Les Saintes maries"

Aujourd’hui, la chimie organique permet de disposer de nouveaux pigments et de résines de synthèse d’une puissance de coloration et d’une résistance toutes particulières.

Profitez au maximum de cette chance que nous avons !

10 Thoughts on “Les couleurs, la couleur dans l’histoire …

  1. Florence Kanban on 11 novembre 2023 at 17 h 05 min dit:

    Cette période autour de la couleur s’annonce passionnante ! Merci pour ce très bel article.
    Et heureuse de savoir que l’Azurite porte le nom de Pierre d’Arménie ☺️.
    Bon WE à tous

  2. PRESSAT Mauricette on 11 novembre 2023 at 19 h 20 min dit:

    Je suis heureuse d’être à nouveau reliée à l’Ocre Bleu. J’ai, ainsi, l’impression d’assister toujours aux cours. Je suis d’accord avec Florence : la période autour de la couleur s’annonce passionnante.
    Et tes articles, Christine, sont toujours très intéressants. Je regrette de ne plus pouvoir peindre, mais je continue à lire tous tes articles. Merci pour ces cours très précieux pour moi.
    Bon week end à tous
    Mauricette

    • L'ocre Bleu on 12 novembre 2023 at 6 h 54 min dit:

      Merci Mauricette et contente de te trouver toujours présente malgré les kilomètres !
      Tu es toujours ” en face de moi” le mardi 😉
      Je t’embrasse
      Christine

  3. Barraco Jeannine on 12 novembre 2023 at 15 h 02 min dit:

    Moi aussi je te retrouve avec plaisir et il me semble encore t’entendre quand je lis tes articles.
    Bisous et à bientôt

  4. Jean Luc RICHIER on 12 novembre 2023 at 17 h 12 min dit:

    Merci Christine
    Passionnant!
    A mardi

  5. Blanc Mireille on 12 novembre 2023 at 18 h 21 min dit:

    Super article!
    Merci Christine de nous plonger ainsi dans le monde des couleurs.

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