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Naturaliste et peintre américain d’origine française, Jean-Jacques Audubon est considéré comme le premier ornithologue du Nouveau Monde... Aussi célèbre aux États Unis que La Fayette !
Peintre autodidacte, chasseur impitoyable, coureur des bois, l’auteur de "Birds of America" a eu une vie très pittoresque.
"Portrait d'Audubon à 41 ans"
Huile sur toile - John Syme ( 1826)
Jean-Jacques Audubon (ou John James Audubon aux États-Unis), naît le 26 avril 1785 à Haïti et meurt le 27 janvier 1851 à New York ; d'origine française il est naturalisé américain en 1812.
Fils illégitime d' une immigrée française, Jeanne Rabine, de la région de Nantes, et d'un capitaine au long cours d'origine bretonne, Jean Audubon, qui possédait dans l'île des plantations et des esclaves, il sera élevé en France, par sa belle-mère, Anne Moynet Audubon, à Nantes et à La Gerbetière, (à 16 km à l'ouest de Nantes), propriété acquise par son père avant la Révolution.
Dans son journal il décrira la « volupté paisible » avec laquelle, jeune, il observait « la lente progression de quelques oiseaux vers la perfection de leur être », et voyait « certaines espèces, à peine écloses, fuir à tire-d’aile, et secouer en volant les débris de leur coque transparente ».
Car très jeune, il se passionne pour l'histoire naturelle.
En 1803, son père l’envoie en Amérique ( semble t'il avec un faux passeport afin d' échapper à la conscription napoléonienne)
À 17 ans, contre-maître dans une ferme près de Philadelphie, il s’adonne surtout à l’exploration des forêts alentour où il chasse et commence à étudier l'histoire naturelle.
Il dirige la première opération de baguage du continent et commence également à dessiner et à peindre des oiseaux.
Il se marie avec Lucy Bakewell avec laquelle il aura trois enfants : Victor, John et une petite fille (décédée avant son premier anniversaire)
Jean-Jacques Audubon est plus doué pour l’aventure que pour faire bouillir la marmite. Tour à tour commerçant en faillite, directeur malheureux d’une scierie, professeur de danse, peintre de portraits, y compris mortuaires, il fera même un séjour en prison pour dettes. Après toutefois plusieurs années de succès commerciaux en Pennsylvanie et dans le Kentucky, il fait faillite, ce qui l'incite à poursuivre avec plus d'ardeur son étude de la nature et sa pratique de la peinture.
Il mène alors à partir de 1810 une vie errante de chasseur ; il descend le Mississippi avec son fusil, sa boîte de couleurs et son assistant, observe la nature, décrit et illustre la flore et la faune, en particulier les oiseaux, avec grand talent, dans l'intention de recenser et de peindre toutes les espèces d'oiseaux d'Amérique du Nord.
« Chaque oiseau était un rival », confiera Lucy, devant les disparitions répétées de son mari en compagnie d’Indiens ou de chasseurs.
Ne disposant pas d'autres revenus, il améliore l'ordinaire en vendant des portraits à la commande, tandis que son épouse, Lucy, travaille comme préceptrice dans les familles de riches planteurs.
En 1814, il rencontre l’ornithologue américain Alexander Wilson ce qui conforte sa passion pour ce qu’il appelle la « tribu à plumes ».
En 1820, employé comme taxidermiste au Musée de l’ouest de Cincinnati, il comprend qu’il a découvert plusieurs espèces non répertoriées par Wilson et envisage enfin ce qui deviendra l’œuvre de sa vie : la publication d’un grand répertoire des Oiseaux d’Amérique.
Dès lors, il va multiplier les expéditions, descendre le Mississippi sur une barge de pionniers pour aller à la découverte des oiseaux de "Louisiane" (la Louisiane française couvrait le quart du continent), pousser en 1832 jusqu’à la Floride et les terres hostiles de l’Arctique, répertoriant au total quelque 500 espèces.
Il réalise ainsi son œuvre majeur, l'œuvre d'une vie : " les Oiseaux d'Amérique " ; aussi beau que scientifique, son travail détaille ces oiseaux en taille réelle et dans leurs habitats naturels.
Il peint à l’aquarelle 435 planches au format "double-éléphant-folio" (98 x 76 cm) représentant tous les oiseaux du continent nord-américain, avec force détails avant la destruction de nombreuses espèces par les conquérants de l'Ouest.
Le succès des "Oiseaux d'Amérique" est lié à leur qualité à la fois artistique et naturaliste, et surtout à l'amour d'Audubon pour la "tribu à plumes", qui rayonne de ces immenses aquarelles.
Celui dont l’Amérique a voulu faire, plus tard, un des pionniers de l’écologie est conscient d’assister déjà à la destruction de nombreux espaces sauvages.
Il fut pourtant aussi un prédateur redoutable : pour dessiner ou peindre les oiseaux, il doit d'abord les abattre avec du petit plomb pour ne pas les déchiqueter.
Audubon tue des oiseaux par centaines ( Il écrit : « Je dis qu'il y a peu d'oiseaux quand j'en abats moins de cent par jour. »), les empaille parfois et les « anime » à l’aide de fils de fer pour les maintenir et leur rendre une position naturelle.
Un de ses biographes, Duff Hart-Davis, observe : « Plus l'oiseau était rare, plus il le poursuivait passionnément, apparemment sans jamais s'inquiéter du fait que tuer le spécimen pouvait précipiter l'extinction de son espèce. »
Puis il les peint à l’aquarelle,... d’abord pour son seul plaisir.
Voyant qu'il a ainsi déjà répertorié des oiseaux inconnus jusqu'alors, il cherche un éditeur pour ses dessins d'oiseaux à Philadelphie, mais sans succès, (sans doute en partie parce qu'il s'était attiré l'inimitié des sommités scientifiques de la ville, membres de l'Academy of Natural Sciences ... la raison ? ces aquarelles contrastaient avec les représentations empesées de ses contemporains tels qu'Alexander Wilson ? ...)
En 1826, il part pour Londres avec son portfolio afin de présenter son travail.
Son succès est immédiat ! Les Britanniques ne se lassent pas des images d'une Amérique sauvage et pleine de forêts.
Il est accueilli comme « l'homme des bois américain » : ses peintures mais aussi son pantalon de trappeur, ses récits d’aventure en terre indienne subjuguent la bonne société des salons et même le roi George IV qui compte parmi ses admirateurs enthousiastes.
Il ouvre une souscription et récolte suffisamment d'argent pour publier Les Oiseaux d'Amérique entre 1830 et 1839.
Il déniche aussi des graveurs prêts à reproduire sur ces planches de grand format, ses peintures d’oiseaux reproduits grandeur nature et dans leur milieu naturel.
Le premier, l’Écossais Lizars, qui travaille à l’eau-forte, jettera l’éponge dès la douzième planche.
Le londonien Havell prendra le relais à l’aquatinte, jusqu’à la 435e planche du quatrième et dernier volume publié en 1839, avec des images entièrement peintes à la main.
L’ensemble de son œuvre comporte 435 illustrations (435 planches gravées et imprimée grandeur nature puis peintes à la main) qui seront publiées en quatre volumes et 200 exemplaires ( de 30 kg chacun !).
Audubon supervisera la gravure et la mise en couleurs de ces quelques 87 000 planches !!!
Audubon est élu membre de la Royal Society, suivant ainsi Benjamin Franklin qui en fut le premier membre américain.
A Édimbourg, il fait une démonstration de sa manière d'utiliser des fils pour déployer les oiseaux devant la Wernerian Natural History Association du professeur Robert Jameson : un étudiant nommé Charles Darwin fait partie du public.
Il adjoint à ses Oiseaux d'Amérique les Biographies ornithologiques (Édimbourg, 1831-1839, 5 volumes in-8) qui contiennent la description de la vie de chaque espèce représentée.
Cet ouvrage est rédigé en collaboration avec l'ornithologue écossais William MacGillivray.
À Paris, Audubon est adoubé par Cuvier qui règne sur l’Académie des sciences et le baron Gérard le sacre « roi des peintres ornithologues ».
Audubon poursuit ses expéditions en Amérique du Nord et achète une propriété sur l'Hudson, aujourd'hui Audubon Park.
En 1842, il publie aux États-Unis une édition populaire des Oiseaux d'Amérique.
Puis entreprend, avec le concours du docteur John Bachman (1790-1874), la description des mammifères, les Quadrupèdes vivipares d'Amérique du Nord, qui paraît à New York en 1850.
Le livre est achevé par ses fils et sa femme.
John James Audubon est sans doute enterré au cimetière de Trinity Churchyard, au croisement de la 155e Rue et de Broadway, dans le quartier de Washington Heights à New York, où se trouve un imposant monument érigé en son honneur.
Après sa mort, sa femme notamment se trouva face à de grands problèmes financiers, les oiseaux de Jean-Jacques Audubon furent revendus individuellement et de nos jours, il ne reste plus que 119 de ses dessins, qui se trouvent à la New York Historical Society.
Ce projet insensé, né dans l'esprit d'un peintre autodidacte de génie dans la première moitié du dix-neuvième siècle : reproduire grandeur nature ( et dans un style bien différent de l'époque - voir les "Oiseaux de Buffon" par exemple ) tous les oiseaux du continent nord-américain, donnera naissance à un ouvrage monumental :" les Oiseaux d'Amérique" auquel Jean-Jacques Audubon consacrera trente ans de sa vie, et qui deviendra le livre d'art le plus côté du monde et de l'histoire.
L'impression de " Birds of America" fut l'édition la plus chère du monde de l'impression.
Mais en 2013, un exemplaire original de son ouvrage s'est vendu près de 8 millions de dollars chez Christie's à New York, le record a été atteint à Londres en 2010 chez Sotheby's pour une autre édition du même ouvrage à 11,5 millions de dollars !
Chasseur et prédateur de nombreuses espèces comme nous l'avons vu, Jean-Jacques Audubon prit conscience de la dégradation de notre environnement, et fut le premier à militer pour la protection de la nature en dénonçant le massacre des animaux (en particulier des oiseaux) et la destruction des biotopes.
" La nature elle-même disparaît et la cupidité de l'homme éliminera bientôt du Labrador non seulement l'homme mais tout être vivant" écrit-il dans son journal en 1833.
Dans les premières années du vingtième siècle, cinquante ans après sa mort, les premiers écologistes américains entendirent son message et prirent pour emblème " le premier ornithologue pratique d'Amérique "(comme il se qualifiait lui-même).
Aujourd'hui, la National Audubon Society (600.000 membres) est la première organisation américaine de protection de la nature. Elle a permis de sauver plusieurs espèces menacées.
« Audubon aurait été partout ailleurs un grand philosophe, un grand orateur, un grand poète, un grand homme d’État, un Jean-Jacques Rousseau, un Montesquieu, un Chateaubriand. Là il n’a pu être qu’un naturaliste, un peintre et un descripteur d’oiseaux d’Amérique, un Buffon des États du Nord, mais un Buffon de génie, passant sa vie dans les forêts vierges (...) et écrivant avec l’enthousiasme de la solitude quelques pages de la grande épopée animale de la création. » Lamartine
Et en savoir + :
http://www.audubon.org/birds-of-america
http://asiamparis.com/les-oiseaux-de-jean-jacques-audubon/
http://janus157.canalblog.com/archives/2016/05/17/33825567.html
Merci pour cette biographie complète.
je vais partir avec mon portefolio pour Londres, j’y aurai peut-être plus de chance !! Hihi !!!
Nul n’est prophète en son pays dit-on ! Pourquoi pas ? 😉