...

"Tout dans Cirque est combiné d'après l'harmonie par analogie, la conciliation des contraires, en vue de sensations gaies : ascendance des lignes, contrastes successifs des tons, dominante orangée très écrite qu'accentue un cadre en opposition de tons et de teintes avec l'ensemble...".
Un critique au moment de l'exposition du tableau
au Salon des Indépendants en 1891.

  a" Le cirque" ( 186 x 152 cm)
 Musée d’Orsay à Paris

En effet  « Cirque » ou " Le Cirque" de Georges Seurat ( peint en 1890) fait suite à deux tableaux : « Parade » et « Chahut ».
S'il est le troisième volet d'une série consacrée par Seurat aux attractions populaires et aux spectacles de la nuit, « Cirque » se présente surtout comme l'une des plus impressionnantes applications de ses recherches divisionnistes, tout en  poursuivant sa réflexion sur la représentation du mouvement, et ce, malgré la rigueur de la technique divisionniste.

Seurat y applique ici les théories de Charles Henry sur les effets psychologiques de la ligne et de la couleur ainsi que celles des lois du mélange optique des couleurs formulées par Chevreul et Rood.

Relire l'article sur la théorie du néo-impressionnisme avec l'importance de la couleur divisée
mais aussi celle de la composition des lignes ici

w - Parade" Parade "

 

z Chahut " Chahut"

Analyse du tableau :

Il est important en premier lieu d'observer le tableau par rapport à son centre, ce qui  permet d'observer l'équilibre des masses.

b

Ici, les 4 sujets  sur la piste : le clown de dos au tout premier plan, le Monsieur Loyal sur la droite, l'écuyère et le cheval se répartissent de façon équilibrée dans les 4 parties dessinées par les diagonales qui définissent le centre.
Le regard vers la droite du clown et l'acrobate dans un saut arrière permettent de les répartir selon une forme classique en triangle.

Deux espaces se juxtaposent :
* celui de la piste et des artistes, tout en courbes, en dynamique ...
* et celui des gradins et du public, rigide, orthogonal, immobile, d'une rigoureuse géométrie.

c

La limite entre les deux parties passe par le centre.

L'organisation rigide de la partie haute du tableau contraste avec la souplesse du premier plan.

" Cirque" représente le numéro de l’écuyère du cirque Fernando (futur cirque Medrano).
Seurat représente ici un plaisir populaire, et lui sert de prétexte à une critique sociale : la superposition des spectateurs est l'occasion d'illustrer la diversité sociale et ses inégalités.

 Le cadrage est influencé par le japonisme alors en vogue.

De nombreux artifices de composition permettent de guider le regard du spectateur et de créer une dynamique : le personnage du premier plan, l'ouverture sur la droite de la toile permettent d'introduire la profondeur,en suivant le ruban que tient le clown selon une oblique du bas en gauche vers le haut à droite, induite aussi par la position de l'écuyère.

e

L'ordre des couleurs obéit aussi à des règles précises : la couleur primordiale est celle de la lumière pure, le blanc, et domine la toile.
Les trois teintes fondamentales : le rouge, le jaune et le bleu, sont " accordées" en petits traits répondant au rythme des lignes.

seurat + cadre

Seurat peint directement une bordure sombre sur la toile puis continue de peindre le cadre avec le même ton : celui-ci fait partie intégrante de l’œuvre.
Comme pour d'autres tableaux, Seurat fait le choix de peindre l'encadrement avec la même technique divisionniste que le reste de l'œuvre, avec une couleur qui fait ressortir la vivacité des tons de la toile, selon la loi des complémentaires.( relire ici )

Seurat travaillera tout l'hiver 1890-91, jour et nuit, à la réalisation de ce tableau complexe (40 personnages), en désirant le présenter au  huitième Salon des Indépendants de mars 1891.
Seurat l'y exposera, partiellement inachevé.
Il meurt subitement pendant l'exposition, à l'âge de 31 ans d'une angine infectieuse.

Signac dira alors: " Notre pauvre ami s'est tué par trop de travail".

Le 20 mars 1891, l'exposition est inaugurée. Seurat se reproche une erreur dans le cheval. Soudain, Puvis de Chavanne, qui fut un modèle pour le jeune artiste à ses débuts, entre dans la pièce. Seurat pense qu'il va remarquer la faute qu'il a faite dans son cheval et s'en ouvre à Angrand. Puvis de Chavanne s'avance lentement, s'approche du " Cirque" ... et passe devant la toile sans même s'arrêter. Seurat est mortifié. Il sort fumer un cigare... Deux jours plus tard, il se plaint d'un fort mal à la gorge et quelques jours plus tard, une hémorragie cérébrale l'emporte ( son fils le suit dans la tombe deux semaines après du même mal , ainsi que l'enfant que portait Madeleine, sa compagne).
Signac, restera longtemps en état de choc...

L’œuvre de Seurat, réalisée en moins de dix ans représente une énorme somme de travail, compte tenu de la méthode scientifique de Seurat, de ses multiples dessins ou "croquetons" préliminaires (jusqu'à trente pour la Grande Jatte) et sa technique pointilliste.

Seurat fut incontestablement à l’origine d’une importante révolution dans le domaine de la peinture.
 Que serait devenu son art s'il avait vécu plus longtemps ?

Nous avons ensemble réalisé ce tableau de Seurat. Pour en retrouver les différentes étapes, je vous propose de les  (re) découvrir dans l'album photo " Le cirque de Seurat" ( ici)

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Post Navigation