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Notre dernière exposition nous a permis de retrouver avec plaisir des dessins d'échiquiers que beaucoup d'entre vous ont travaillés, exploités, et insérés dans leurs travaux illustrant les jeux de société.

Le diaporama de l'expo ici

De les voir (ou les revoir) nous donne l'occasion de nous arrêter  à nouveau sur ces 64 cases blanches et noires.

Mais cette fois, promis, nous ne parlerons pas

de perspective


mais simplement de couleur !

Et d'histoire de la couleur !


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Pour nous, dans notre monde actuel,

les cases des échiquiers

et des damiers

sont donc noires et blanches,

la plupart du temps,

...

Mais il n'en a pas toujours été ainsi.


En effet, la structure bichrome des cases alternées en damier n'a pas toujours existé.

Plusieurs miniatures indiennes ou persanes,ainsi que de nombreuses images médiévales européennes nous montrent des échiquiers sur lesquels les cases sont formées par le simple croisement de lignes horizontales et verticales.

Ces lignes sont le plus souvent rouges, et les cases, blanches ou jaunes.

Pour jouer aux échecs, la bichromie alternée des 64 cases n'est pas obligatoire, ni même nécessaire, même si elles aident à mieux visualiser les coups. Ne pas disposer de telles cases demande une concentration extrême et une vision géométrique que la plupart des joueurs d'aujourd'hui ne possèdent plus.

Puis quand elle existe, cette alternance de l'échiquier n'a du reste pas toujours été formée de blanc et de noir... association qui constitue le contraste chromatique le plus accentué ... du moins en occident, et actuellement.


Les pièces d'échecs et les échiquiers

n'ont pas toujours opposé

un camp blanc et un camp noir.


Au début du VI° siècle de notre ère, le jeu d'échec nait en Inde du nord : il oppose un camp rouge et un camp noir.

Au VIII° s., quand la culture musulmane s'approprie ce jeu, elle en garde les mêmes couleurs.


Mais quand le jeu arrive en Europe, un peu avant l'an 1000, pour l'occidentaliser,(rouge contre noir ne signifie rien pour la mentalité féodale et chrétienne) on change donc le noir en blanc et ainsi s'affronte sur l'échiquier un camp rouge et un camp blanc.

" Rouge - blanc " constitue alors le couple de contraires le plus fort, et qui était alors le plus utilisé dans l'emblématique et dans les pratiques codées de la couleur.

Depuis longtemps, en effet, le moyen-âge chrétien construisait ces systèmes de la couleur autour de trois pôles : Le blanc, le noir et le rouge, c'est à dire autour du blanc et de ses deux contraires.

 


Trois siècles plus tard, cependant, ce choix est remis en cause, et peu à peu, fin 13e siècle - courant 14e,le couple " blanc - noir " devient plus efficace que le couple "blanc - rouge ".

Entre-temps la couleur noire avait en effet connu "une promotion remarquable" : de couleur du diable, de la mort et du péché elle était devenue couleur de l'humilité et de la tempérance. 

De plus, cela rejoint la théorie d'Aristote quant à la classification des couleurs qui faisait du blanc et du noir les deux pôles extrêmes de tous les systèmes.


Dans de nombreux domaines, l'opposition du blanc et du noir commence alors à être pensé comme plus forte et plus riche de sens que celle du blanc et du rouge.


Les échecs, jeu symbolique et philosophique,

ont subi l'influence des mutations des systèmes de pensée

au cours des siècles.


Sur les échiquiers,

les pièces et les cases rouges ont ainsi cédé leur place progressivement aux pièces et aux cases noires.

...


Et de nos jours, quoi de plus noir et blanc qu'un échiquier ?

Pour en savoir + ,

" La couleurs de nos souvenirs "

Michel Pastoureau

Editions du Seuil



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